Newsletter décembre 2025
Editée par Bohnet F., Carron B., Eggler M., Varin S. avec la participation de
Avec le soutien de La chambre des avocats spécialistes FSA en droit de la construction et de l'immobilier
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Toute l'équipe de la newsletter immodroit.ch vous souhaite de très belles Fêtes de Noël et formule ses voeux pour une heureuse et fructueuse année 2026 !
Servitude; usufruit immobilier; libération d’une servitude; art. 736, 745 ss CC
Usufruit immobilier – Rappel des principes (consid. 3.4.1-3.4.3). Libération d’une servitude (art. 736 CC) – Rappel des principes (consid. 3.4.4). L’application de l’art. 736 CC à un usufruit est discutée dans la doctrine (consid. 3.4.5). Pour le Tribunal fédéral, les cas dans lesquels une perte totale d’utilité d’un usufruit au sens de l’art. 736 al. 1 CC doit être reconnue sont rares, voire théoriques ; le simple fait que son titulaire ne soit plus en mesure de l'utiliser personnellement et directement n’est en tous les cas pas suffisant. En l’espèce, lors de l’achat d’un chalet, l’épouse a été inscrite comme propriétaire et le mari comme usufruitier à vie. L’usufruit constitué n’offrait pas des droits exclusifs à son bénéficiaire, mais prévoyait un usage conjoint avec l’épouse. En l’occurrence, même s’il fallait admettre que l’époux a perdu tout intérêt à user du chalet en raison du divorce, il conserve à tout le moins un intérêt objectif à exploiter sa valeur. La cause est renvoyée pour que l’instance précédente se prononce sur une libération partielle de l’usufruit en application de l’art. 736 al. 2 CC (consid. 3.5).
Avocat spécialiste FSA de la construction et de l’immobilier, Expert immobilier EPFL, Arbitrator / ArbP
Responsabilité civile; responsabilité du propriétaire d’ouvrage; art. 58 CO
Responsabilité du propriétaire d’ouvrage (art. 58 CO) – Rappel des principes (consid. 7.1.1). Comme tous les autres ouvrages publics, les routes doivent être conçues et entretenues de manière à offrir aux usagers une sécurité suffisante. Cependant, l’entretien du réseau routier ne peut être assuré de la même façon que celui d’un bâtiment individuel. Il suffit que la route soit praticable sans danger en faisant preuve de prudence. Il convient d’examiner au cas par cas si le gestionnaire de la voirie était en mesure de remplir son obligation compte tenu du temps, des moyens techniques et financiers dont il disposait. La question du caractère raisonnable des mesures de sécurité est également appréciée différemment selon qu’il s’agit d’une autoroute, d’une route principale à fort trafic ou d’une route de campagne. Si un obstacle se trouve sur la chaussée et ne peut être repéré à temps par un usager faisant preuve de prudence, cet obstacle doit au moins être correctement signalé (consid. 7.1.2). Une amélioration réalisée après un incident malheureux ne saurait valoir reconnaissance d’un vice préexistant. En effet, il est essentiel d’éviter que la volonté d’agir spontanément afin de prévenir la récurrence d’un accident soit entravée par la crainte que cela puisse être interprété comme une reconnaissance de responsabilité (consid. 7.9).
Contrat d’entreprise; inachèvement de l’ouvrage; dommage; art. 366 ss CO; 2 CC
Inachèvement de l’ouvrage - Si le maître a explicitement accepté l’ouvrage tel quel, il ne peut manifestement pas se contenter d’invoquer, bien plus tard, que selon lui, cet ouvrage était en réalité inachevé. Un tel comportement n’est pas compatible avec la bonne foi et ne saurait être protégé (consid. 4.3).
Dommage – Lorsque le maître résilie le contrat, il n’est pas arbitraire de retenir l’absence de dommage pour l’entrepreneur, lorsque l’ouvrage a finalement pu être livré à un tiers, pour un prix supérieur, et qu’il apparaît même que c’est parce l’ouvrage était disponible que le contrat avec le tiers a pu être conclu (consid. 5.2-5.3).
Contrat d’entreprise; exception d’inexécution; devoir d’allégation en matière de prescription; demeure du débiteur; art. 82, 102, 128 CO; 190 Norme SIA 118
Exception d’inexécution (art. 82 CO) – Rappel des principes. Il incombe au débiteur d’invoquer clairement et sans ambiguïté l’exception prévue à l’art. 82 CO (consid. 3.3).
Devoir d’allégation en matière de prescription – Celui qui se prévaut de l’échéance du délai de prescription de 5 ans au sens de l’art. 128 al. 3 CO doit expliquer pour quelle raison la créance est soumise à ce délai (consid. 5.3).
Demeure du débiteur – En principe, la demeure du débiteur requiert un rappel du créancier (art. 102 al. 1 CO). Ce principe vaut également si la Norme SIA 118 trouve application (art. 190 Norme SIA 118, qui renvoie explicitement au CO). Un tel rappel n’est pas nécessaire si une date d’échéance fixe a été convenue (art. 102 al. 2 CO) (consid. 6.4).
Contrat d’entreprise; travaux supplémentaires; représentation; art. 18, 33 CO; 33 ss Norme SIA 118
Travaux supplémentaires – Lorsque le contrat prévoit que les travaux supplémentaires ne pouvaient être réalisés qu’avec l’accord écrit du maître d’ouvrage, l’entrepreneur ne peut considérer que les prix négociés avec la direction des travaux sont fermes et définitifs. En réalisant les travaux sans approbation du maître d’ouvrage, l’entrepreneur a accepté l’incertitude quant au prix (consid. 2). En l’espèce, on ne peut pas non plus retenir que les prix auraient été acceptés par une représentation au sens de l’art. 33 al. 3 CO, faute de bonne foi de l’entrepreneur (consid. 3).
Contrat d’entreprise; rapport entre un marché public et le contrat de droit privé; responsabilité pour culpa in contrahendo; fardeau de la contestation; art. 55, 222 CPC
Rapport entre un marché public et le contrat de droit privé – Rappel des principes (consid. 5.2.2). Responsabilité pour culpa in contrahendo – Rappel des principes (consid. 5.4.1). Fardeau de la contestation – Rappel des principes (consid. 6.1.3). En l’espèce, le maître d’ouvrage n’a pas démontré de façon convaincante, dans sa défense, que le poste « enlèvement et élimination » n’était pas, comme tous les autres postes des travaux proposés, calculé sur la base des forfaits de l’offre initiale (consid. 6.1.6).
Servitude; droit de passage nécessaire; art. 694 CC
Droit de passage nécessaire (art. 694 CC) – Rappel des principes. Un tel droit n’existe que lorsqu’un propriétaire foncier ne dispose pas de l’accès à une voie publique pour l’usage prévu de son bien. L’usage prévu d’un bien est déterminé par le droit public, en particulier par la Loi sur l’aménagement du territoire (LAT). En général, l’occupation d’un bien situé en zone agricole par des personnes n’exerçant pas d’activité agricole n’est pas conforme à sa destination (consid. 3.1).
Hypothèque légale des artisans et entrepreneurs; délai et date d’achèvement des travaux; inscription provisoire; fardeau de l’allégation; art. 839, 961 CC; 55 CPC
Délai et date d’achèvement des travaux (art. 839 al. 2 CC) – Rappel des principes (consid. 3.1). Inscription provisoire (art. 961 al. 3 CC) – Rappel des principes (consid. 3.2). Fardeau de l’allégation (art. 55 CPC) – Rappel des principes (consid. 3.3). En l’espèce, il incombait à l’entrepreneur, pour rendre son droit à l’inscription provisoire vraisemblable, d’exposer pourquoi les travaux litigieux, de par leur nature et leur finalité, demeuraient nécessaires à l’achèvement du projet, d’autant plus qu’il avait déjà émis la facture finale et travaillait déjà sur d’autres aspects du chantier, en vertu de contrats d’entreprise distincts (consid. 4.3.1).
Propriété/possession; expropriation des droits de voisinage; art. 26 Cst.
Expropriation des droits de voisinage – Rappel des principes (consid. 6-6.4). Les nuisances liées à l’exploitation d’un ouvrage public ne sont généralement considérées comme excessives et n’ouvrent le droit à une indemnisation que si, cumulativement, elles étaient imprévisibles pour le propriétaire, elles l’affectent de manière particulière et elles lui causent un préjudice grave (consid. 6.2). Ces critères stricts doivent être appliqués par analogie au cas d’espèce, à savoir aux droits de défense du voisin qui subit indirectement la protection d’un séquoia géant situé sur une parcelle voisine. Retenir une expropriation formelle de ces droits reviendrait à favoriser ce voisin par rapport au propriétaire de l’arbre, directement atteint, mais qui se trouve dans un cas d’expropriation matérielle (consid. 6.6.2). La question de la prévisibilité de la mesure de protection de l’arbre est laissée ouverte dans la mesure où il ne fait pas de doute que le critère de gravité n’est pas rempli, la nuisance se limitant à un ombrage mineur, au nord-est de la maison des voisins (consid. 7.2.1).
Propriété/possession; expropriation matérielle, déclassement et non-classement; art. 26 Cst.
Expropriation matérielle, déclassement et non-classement – Rappel des principes (consid. 2.1-2.3). En l’espèce, le plan de zones de 1982 contenait une zone à bâtir qui s’est avérée surdimensionnée dans les années qui ont suivi. On ne saurait retenir que la zone à bâtir s’est révélée trop large a posteriori, par exemple en raison d’un changement de circonstances ou d’une évolution démographique imprévisible. L’adoption de la Loi fédérale sur les résidences secondaires (LRS) plus de 30 ans après l’adoption du plan, soit au-delà de l’horizon de planification de 15 ans, ne saurait apparaître comme un changement de circonstances décisif. Bien qu’aucun document ou expertise ne démontre le surdimensionnement, il ressort du dossier que la commune avait connaissance que sa zone à bâtir était surdimensionnée, et qu’elle n’a pas jugé utile d’effectuer un calcul des besoins futurs prévisibles. L’affectation de la parcelle litigieuse à la zone agricole, lors de la modification du plan de zones adoptée en 2018, doit partant être qualifiée de refus de classement (consid. 3.3.2).
Marchés publics; Annulation d’une décision d’adjudication en cas de violation du devoir de récusation; art. 29 al. 1 Cst.
Annulation d’une décision d’adjudication en cas de violation du devoir de récusation – Une décision d’adjudication rendue en violation des exigences de récusation déduites de l’art. 29 al. 1 Cst. doit en principe être annulée, sans qu’il ne soit nécessaire de démontrer que la décision aurait été différente en cas de respect desdites exigences. Il est possible de déroger à ce principe exceptionnellement si la violation du devoir de récusation considérée n’est pas importante et s’il est démontré que celle-ci n’a nullement influé sur le choix de l’adjudicataire. Cette preuve doit être admise restrictivement (consid. 6.4).
En l’espèce, le non-respect de l’obligation de se récuser n’est pas particulièrement grave. Les personnes dont l’impartialité est remise en cause n’ont fait que participer, en tant qu’experts externes, à une première évaluation des offres sous l’angle de deux sous-critères d’adjudication sur neuf, sans procéder eux-mêmes à la notation desdites offres, laquelle a été opérée par un jury auquel ils n’appartenaient pas (consid. 6.7.1). Il est également vrai que l’entreprise soumissionnaire resterait seconde au classement si l’on admettait les conclusions qu’elle formule en relation avec la notation de ces seuls sous-critères. Cela ne permet toutefois pas de démontrer qu’une récusation n’aurait rien changé au résultat final de la procédure. Les demandes de correction qu’une entreprise soumissionnaire peut formuler contre une décision d’adjudication ne rendent pas nécessairement compte de toutes les conséquences potentielles qu’un non-respect d’un devoir de récusation peut avoir sur l’ensemble de la procédure. Il est par définition presque impossible pour un concurrent évincé de jauger l’incidence réelle sur l’évaluation de l’offre victorieuse. La décision d’adjudication est donc annulée (consid. 6.7.3-6.7.4).
Marchés publics; recours d’un consortium; art. 22 LPAmm/TC
Recours d’un consortium – En matière de marchés publics, il est généralement admis que les membres d’un consortium doivent contester conjointement la décision d’adjudication qui leur est défavorable (consid. 4.3). En vertu du principe de la bonne foi, la partie intéressée doit agir dans un délai raisonnable, dès qu’elle a connaissance de l’existence de la décision qu’elle entend contester. La société qui n’a pas réagi à la notification n’est pas de bonne foi, malgré le fait que la décision aurait dû être notifiée à une autre société, représentante du consortium. Un autre membre du consortium ne subit pas de conséquences choquantes de ce résultat, car il doit assumer le risque de participer à un appel d’offres avec une entreprise dont il savait qu’elle présentait de graves défaillances administratives (consid. 4.4).
Poursuites pour dettes et faillites; faillite sans poursuite préalable; défauts; art. 190 LP; 366-367 CO
Faillite sans poursuite préalable (art. 190 LP) – Rappel des principes (consid. 3.1.1). Celui qui requiert la faillite sans poursuite préalable doit rendre vraisemblable sa qualité de créancier. En l’espèce, la conclusion, la validité et le contenu du contrat d’entreprise totale, de même que le paiement du prix n’étaient pas litigieux. La créance poursuivie portait sur des prétentions au sens des art. 366 et 367 CO. Une expertise judiciaire avait conclu que le coût des travaux de finition et d’élimination des défauts s’élevait à environ CHF 524’343, montant correspondant à la créance poursuivie. Au degré de la simple vraisemblance, il n’est pas arbitraire de retenir que ces éléments étaient probants quant à l’existence de la créance (consid. 3.4).
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