TF 4A_403/2022 du 31 janvier 2023

Garanties; interprétation du contrat; délimitation entre le porte-fort et le cautionnement; art. 18, 111 et 492 ss CO

Interprétation du contrat (art. 18 CO) – Rappel des principes (consid. 6.2 et 6.3).

Lorsque le maître d’ouvrage s’engage dans un accord écrit à payer la créance résultant d’un certain nombre de contrats signés par les entrepreneurs sans limitation (« zur Zahlung der Forderung aus Verträgen »), l’on ne peut retenir, dans le cadre d’une interprétation objective, qu’il ne s’engageait qu’au paiement de l’acompte, lequel était chiffré à CHF 100’000.-. C’est en particulier le cas lorsqu’il apparaît que le but du contrat était de garantir l’achèvement des travaux du côté du maître, en contrepartie d’une garantie pour l’entier des créances auprès d’un tiers dont la solvabilité est douteuse. En outre, la créance finale était estimée dans le contrat à CHF 204’723.20 (consid. 6.3 et 6.4).

Délimitation entre le porte-fort (art. 111 CO) et le cautionnement (art. 492 ss CO) – Présentation des deux contrats (consid. 7.1.1). Le critère de délimitation prépondérant entre les deux institutions est l’accessoriété. Alors que le porte-fort correspond à une garantie indépendante, le cautionnement est accessoire, ce qui signifie qu’il partage le sort de la dette principale, en ce sens que l’obligation accessoire dépend de la dette principale et la suit en tant que droit accessoire (consid. 7.1.2). L’intérêt du promettant dans l’opération est un indice important : en cas de cautionnement, il n’y a généralement pas d’intérêt propre de la caution dans l’opération à garantir. Il est typiquement conclu pour garantir un engagement de membres de la famille ou d’amis proches et c’est aussi la raison pour laquelle il a été soumis à des prescriptions de forme particulière (consid. 7.1.3).

En l’espèce, l’intérêt propre du maître d’ouvrage qui souhaitait terminer les travaux sur son bâtiment afin de pouvoir y ouvrir un hôtel est manifeste, ce qui plaide en faveur d’une qualification de porte-fort. Le fait que la convention ne contienne pas de renonciation expresse aux exceptions et objections ne change rien à cette qualification, car une telle renonciation n’est en rien constitutive du contrat de porte-fort (consid. 7.2 et 7.3). De plus, contrairement au cautionnement, il n’est pas nécessaire de prévoir un montant garanti maximal et déterminé dans le porte-fort (consid. 7.3.1). Enfin, la présomption jurisprudentielle en faveur du cautionnement ne trouve pas application en l’espèce, car elle s’applique aux personnes privées alors que le maître est une société active dans l’immobilier. Cette présomption ne peut en outre entrer en ligne de compte que si la qualification du contrat selon le principe de la confiance n’aboutit à aucun résultat, ce qui n’est pas le cas en l’occurrence (consid. 7.3.2). Le fait que les parties ait décrit l’accord comme une reprise cumulative de dette n’a pas d’effet sur la qualification juridique d’un contrat que le tribunal examine librement (consid. 7.3.3).

Garanties

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