TF 4A_29/2022 du 19 avril 2022
Contrat de vente immobilière; erreur de base; art. 24 al. 1 ch. 4 et 26 CO
Erreur de base (rappel des principes) – Un contrat n’engage pas celui qui, lors de sa conclusion, s’est trouvé dans une erreur essentielle (art. 23 CO). Une telle erreur existe notamment lorsque l’erreur portait sur un état de fait déterminé que la personne qui s’est trompée considérait, selon les règles de la bonne foi dans les relations commerciales, comme un fondement nécessaire du contrat (art. 24 al. 1 ch. 4 CO). Outre le caractère subjectif essentiel, il est nécessaire que l’état de fait sur lequel se fonde l’erreur apparaisse aussi objectivement, conformément au principe de la bonne foi dans les relations commerciales, comme le fondement nécessaire du contrat. L’erreur selon l’art. 24 al. 1 ch. 4 CO peut porter sur un fait futur, mais uniquement si ce fait pouvait être considéré objectivement comme certain au moment de la conclusion du contrat. Il faut en outre que la partie adverse ait dû reconnaître que la certitude de la survenance de l’événement futur était une condition contractuelle pour l’autre partie. Est objectivement essentielle une idée fausse qui est nécessairement commune aux deux parties, consciemment ou inconsciemment, et qui, considérée objectivement, a été une condition indispensable à la conclusion du contrat (consid. 2.1).
Invocation de l’erreur de base en cas de négligence de la personne dans l’erreur – Il peut y avoir une erreur de base au sens de l’art. 24 al. 1 ch. 4 CO même si l’erreur est due à la négligence de la personne qui s’est trompée. La négligence ne prive donc en principe pas l’auteur de l’erreur de l’invoquer, mais elle a en général pour conséquence qu’il doit verser des dommages-intérêts à sa partie adverse conformément à l’art. 26 CO. Le principe de la bonne foi (art. 25 al. 1 CO) constitue toutefois une limite à l’invocation de l’erreur de base. Si, lors de la conclusion du contrat, une partie ne se préoccupe pas de clarifier une question évidente, l’autre partie peut en déduire, selon les règles de la bonne foi, que cette circonstance n’est pas considérée par le partenaire comme un fondement nécessaire du contrat. Un comportement négligent peut donc, justement en relation avec d’autres circonstances, faire apparaître une invocation de l’erreur sur les fondements comme contraire à la loyauté et donc irrecevable (consid. 2.1).
En l’espèce, s’informer trois années avant la vente immobilière d’un possible changement d’affectation du terrain vendu n’est pas suffisant ; une partie contractante consciencieuse aurait dû, avant de signer le contrat, se renseigner auprès de la commune sur les possibilités de changement d’affectation actuelles et pertinentes pour la vente, afin d’éviter toute erreur. Dans ces circonstances, l’acheteur doit se laisser imputer l’absence de clarification comme une négligence et son erreur, selon laquelle le changement d’affectation d’une grange était exclu, doit être imputée à son manque de diligence. Il s’agit donc d’une erreur par négligence au sens de l’article 26 CO (consid. 2.5 et 2.6).